l'aube d'une révolution C.Pheline; regard critique ahmed bencherif

 Chapitre 1er 

: « Il y a une révolution ! »

 

 

                        Page .11

          «  Il y a une révolution ! »

 

              Voilà un titre à sensation qui chatouille l’orgueil de tout homme libre. Christian Phéline nous oriente à dessein vers cette direction et en fait toute une polémique. Il emprunte cette phrase qui a été  prononcée par un acteur pendant ces évènements. Cependant, l’interprétation qu’en font les forces en présence diffère. Nous verrons plus loin comment était son contexte historique et quelle était sa réelle portée.     

     

         «  Parquet Blida télégraphie soulèvement indigènes commune de Margueritte. Cinq colons, un garde champêtre et un tirailleur tués, plusieurs blessés, troupes sont parties et ont refoulé indigènes dans la montagne. Parquet Blida sur les lieux. Je m’y rends à l’instant. »

 

         Voici un télégramme d’apparence officielle bien intriguant et qui d’emblée ée sème les doutes sur l’authenticité de l’ouvrage. En effet, comment peut-on concevoir un document officiel sans référence, sans expéditeur, sans destinataire. Mais l’auteur fait carrément du spectacle au lieu de faire un travail d’historien comme il prétend l’être, ou comme le conforte dans ce statut François Lavergne,  dans sa note de lecture.

         Ceci nous permet de poser judicieusement la question suivante : qu’est-ce qu’un historien ?

        Un historien nous rapporte des faits passés, d’en proposer une interprétation équilibrée justifiée par des sources, sachant que la source désigne l’origine de l’information. Celle-ci est un concept complexe lié aux notions suivantes : contrainte, communication, contrôle, donnée, formulaire, connaissance, signification, perception, représentation. Quant aux éléments bibliographiques, ils ont un rapport avec  la masse des sources et leur qualité est importante pour transmettre un fait. Ainsi Christian Phéline néglige totalement de recourir à la source mère dans les événements qu’il tente de transmettre, en l’occurrence la thèse magistrale de Charles Robert Ageron : les Musulmans Français et la France de 1871 à 1919. En revanche, il recourt à une source, d’abord négligeable en volume et en diversité, celle de Peter Von Sivers, modeste article édité dans un ouvrage groupé l’islam dans les révoltes algériennes. Ceci nous amène à poser judicieusement la question pourquoi il le prend comme référence. Disons tout de suite que l’interprétation qu’il fait de celle-ci le conduit irrémédiablement à des manipulations et souvent dans la trame de son enquête, les contresens foisonnent. 

  

     - pages 12 / 13.

       « L’alerte provient de Kouider Ali Laribi, caïd, adjoint indigène……Aux dires du caïd, Taalibi …lui aurait révélé que leur but était de rejoindre Bouamama….. » 

       «il faut plus de deux heures pour qu’un jeune administrateur adjoint, Raoul Monteils, se mette en route, accompagné de deux cavaliers…..Kouider a la maladresse de se rendre à la mechta d’où les futurs pèlerins le prennent en chasse. Il se retranche dans la maison forestière. »

      «  Un siège s’organise. Labsède, le garde champêtre, de passage, tente une sortie, le fusil à la main. Est-il le premier à tirer ? Entraîné dans la cour, il est sommé de prononcer la Chahada….S’y refusant, il est matraqué puis achevée d’une balle. La maison est fouillée, on s’empare du caïd, qui plus tard réussira à s’échapper. »

       «  Lorsqu’il arrive enfin à Tizi-Ouchir, l’administrateur adjoint est désarçonné, décoiffé, déshabillé, revêtu d’un burnous.. Il en va de même pour les conducteurs de quatre chariots chargés de sable, dont les chevaux sont pris comme montures. »      

  

        Ce récit est imprécis. Voilà ce qui s’est passé :

 

       » Une information était arrivée à l’administrateur de la commune mixte Marel, selon laquelle les Rahmaniya allaient donner une aumône votive au mausolée de sidi Bouzar le 22 avril. Il enjoignit, deux jours plus tôt, au caïd Kouider Ali Larbi d’aller s’en assurer.  Celui-ci ne s’y rendit pas. Le 24 avril, 30 adeptes de la Rahmaniya se réunissent au marabout de sidi  Yahia Benbouzar. Trop inquiet par cette information non confirmée qu’avait transmise le garde-champêtre Labessède, Marel dépêcha l’administrateur adjoint Monteils et le caïd Kouider, escortés par deux goumiers, pour la vérifier. Car toute aumône votive est soumise préalablement à une autorisation de l’administration. L’inobservation de cette règle expose les contrevenants à de sévères sanctions. Mais cette mission d’investigation s’arrêta à la maison forestière, quand un groupe d’insurgés armés les eut assaillis. Les hommes de l’ordre paniquèrent et Labessède prit son fusil et tira en direction de leurs assaillants dans la précipitation et la balle alla se perdre dans les buissons. Au moment où il tirait, un insurgé tira sur lui et le tua à bout portant. Monteils, qui connaissait l’arabe, prononça la profession de foi islamique, quand les insurgés lui commandèrent de l’adopter.  

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