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au c ampement extr Marguerite Ahmed Bencherif

 

Le campement se réveilla plutôt au dernier quart de la nuit, qu’aux aurores. Les individus avaient bien dormi et n’éprouvaient point de paresse, ni cette fâcheuse habitude citadine de bâiller au lever. Ils étaient prêts à se dépenser, hommes et femmes. Dans la cuisine, une ménagère avait allumé le feu et servait de l’eau chauffée pour les ablutions, une autre préparait la soupe, une autre pétrissait la semoule. Il faisait encore noir, quand le petit déjeuner fut servi ; chacun se restaura avec un appétit de gros mangeur. L’obscurité ne dura pas plus d’une demi heure et fut chassée promptement par les premières lueurs du jour, alors les hommes se démenèrent : certains éconduisirent les troupeaux, d’autres emmenèrent des bourricots pour colporter de l’eau, d’autres encore allèrent sur deux mulets pour ramener du bois de combustion, tandis que hadj Kadda et Hamza montèrent à cheval pour faire une promenade.     

        Au petit matin, hadj Kadda, deux de ses fils et Hamza partirent vers le campement où ils devaient déjeuner. Ils y arrivèrent une demi heure plus tard. Leur hôte, Salem, les reçut avec convivialité dans la grande tente. Le même rite culinaire est observé  en milieu bédouin, les mêmes habitudes. Les invités passèrent donc une journée à manger presque sans fin et à la tombée de la nuit, ils regagnèrent leur campement. A l’aube, Hamza fit ses adieux et prit le chemin du retour. Il cavala longtemps et fit, vers le coup de neuf heures, un crochet au piedmont où il espérait revoir Haidar et dada Aicha. L’exploitation pierreuse n’avait pas changé et offrait le même tableau de désolation et d’infécondité ; le sol était imparfaitement labouré et avec discontinuité, selon la  résistance de la roche; les remblais s’accumulaient en contre bas de la montagne et le puits avait juré d’être inviolable. Sans descendre de cheval, Hamza appela le vieux révolutionnaire : « Haidar ! Haidar ! » Celui-ci était au fond d’un fossé, à moins d’un mètre de profondeur. Il cognait avec force et hargneusement une roche plus dure que l’airain qui le dissuadait en dégageant souvent des étincelles éparses. Il jeta la masse, monta sur une roche, se hissa lentement et sortit du fossé. Il était soulagé de s’arroger une trêve, la trêve d’un combattant. D’ailleurs, il le pensa, il menait un combat permanent contre les forces de la nature qui demeuraient victorieuses.  

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