Présentation analytique Marguerite tome 2
Si le premier tome, le personnage principal, Hamza, a développé sa personnalité dans un quotidien rude pour ses gens, ces indigènes de parole confisquée et soumis aux plus injustes des exactions, dans le premier tome il est déjà un contestataire majeur, à l’age de dix sept ans au plus. C’est donc en 1901, qu’il est appelé à évoluer dans la société de Marguerite, petit village mixte, à prépondérance indigène. Il entre dans une étape cruciale de sa vie qu’il a décidé déjà de sacrifier pour que vivent ses gens dans la dignité, ou tout au mois rappeler crûment aux colons que la flamme de la révolution n’était pas morte et que l’espérance d’arracher l’indépendance existait toujours mais, juste en y mettant les moyens de sa libération, soit le recours à la violence. Dans son adolescence, il rêvait de révolution vigoureuse, de grande échelle sur une aire géographique assez étendue, au moins dans sa propre région. Dans sa prime jeunesse, il revient malgré lui aux évidences incontournables. Son projet révolutionnaire, devient modeste, à la hauteur d’une révolte locale. Dans le camp adversaire, les choses évoluent avec une grande vitesse. Les colons veulent définitivement gouverner à eux seuls, loin d’immixtion de la métropole. Ils commencent alors une véritable stratégie pour parvenir à leurs fins. Ils ciblent la frange de société la plus faible, soit les Juifs qui avaient été proclamés citoyens français par le décret Crémieux. Il fallait mettre mal à
la France, en s’attaquant aux Juifs d’Algérie qui passèrent des moments difficiles. En effet, ils furent victimes de violences excessives : leurs magasins ont saccagés et pillés ; quant à eux, ils furent agressés et on compta plusieurs blessés parmi et un mort, selon Ageron et deux selon d’autres sources. Les colons étaient puissants et disposaient de relais influents au parlement. Ils bloquaient l’action administrative des gouverneurs généraux successifs et des trois préfets, lesquels ne pouvaient que courber l’échine, sinon ils tombaient en disgrâce. Sur ce fond de drame des Juifs, était né le mouvement révolutionnaire du parti colonial sous l’impulsion des gros propriétaires dont le premier congrès en 1897 constituait une assise de revendications majeures ; puis en 1898, le mouvement estudiantin prit le relais et organisa des meetings et des manifestations populaires ; le chef de file en était un jeune, beau comme un dieu, fille d’une veuve très riche qui le pourvoyait en tout et pour tout. Bien sur, il laissait sa faculté de droit et mobilisait les masses ; comme partout dans le monde, les étudiants furent maîtres de la rue et menèrent le combat de façon irréductible. Ils brûlèrent aussi les effigies de Dreyfus et d’Emile Zola. Il y eut confrontation avec les services de l’ordre qui n’essayèrent vraiment pas de les contenir de façon musclée. Le gouverneur général était dépassé par les évènements, ainsi que les trois préfets de département. Le mémorandum des révolutionnaires fut levé au parlement qui en était favorable et le gouvernement en était absolument outré et s’opposait à l’octroi de l’indépendance d’Algérie. Le parti colonial frappa encore fort et oeuvra à faire tomber en disgrâce le gouverneur général. Il y parvint sans difficultés et obtint fin décembre 1900, l’autonomie financière avec institution de délégation financière, sorte de parlement local. Le mouvement insurrectionnel indigène, incarné en la personne de Hamza et de Mabrouk, deux figures complémentaires, suivait l’évolution politique. Il tint à marquer son refus à donner plus de pouvoir aux colons qui oppressaient le peuple. Tous deux préparent la révolte et se cotisent pour acheter les armes à feu ; accompagnés de quelques militants de la cause, ils font un long voyage à l’est du pays, paqssent à Elhamel (Bou-saada) pour demander bénédiction à lala zineb, la moqadema de la rahmaniya dont mabrouk était affidé. La cheikha ne leur dit rien et eux-mêmes ne dévoilent pas leur projet. Au 26 avril 1901, les 125 insurgés armés de fusils et de sabres assiégèrent le village de Marguerite. Mabrouk était une sorte de derviche et dans la colère, ils exigèrent des colons rassemblés dans la lace de se convertir à l’islam, sous peine d’être égorgés. Cinq colons ne se prêtèrent pas à cette conversion ; ou ils n’avaient pas copris l’arabe ou ils avaient carrément refusé l’apostasie. Le soir les renforts vinrent de Meliana ; il y eut une confrontation avec les insurgés dans la périphérie du village, puis dans la forêt. Les révolutionnaires furent vaincus et arrêtés.La cour d’assises fut contrainte de différer le jugement, car la pression de l’opinion publique était forte et exigeait un lynchage sur la place publique, sans tarder et sans information judiciaire. Cet évènement fut une explosion dans un ciel serein et les médias français saisirent vite l’affaire et conclurent à un acte de désespoir des indigènes brimés. La cour de cassation retira le dossier à la cour d’assises d’Alger et le confia à celle de Montpellier et ce sous la pression de l’opinion publique française qui était scandalisée par les fers dans lesquels étaient tenus les indigènes et la tribu des Righa insurgée. Des politiques français épris de justice plaidèrent la cause des indigènes écrasés par l’impôt et privés du droit naturel élémentaire ; car les indigènes n’étaient ni sujets, ni citoyens ; mais des sous-hommes auxquels toute clémence ou parole était bannie. Le procès fut célèbre en son temps et dura presque deux ans, au terme duquel un jugement clément a été prononcé pour les insurgés ; c'est-à-dire des peines de réclusion allant de 7 à 15 ans ; les deux héros moururent deux ans après en prison.
Journée du 21 décembre 2009, sous l’auspice de lAssociation Safia Kettou à la l’auberge de jeunes Tyout ; Ahmed Bencherif