il n e se passe rien ahmed bencherif écrivain

J’actionne la sonnerie. Elle vient m’ouvrir en trainant le pas que j’entends distinctement. Je perçois aussi un clic : elle allume le hublot en plastique de l’avant-cour. Elle ouvre la porte à demi. Je la regarde : son air est crispé. J’entre gauchement en me frottant les mains, feignant d’avoir froid, seulement pour détendre l’atmosphère qui ne présageait rien de bon. J’arbore un discret sourire qui va plutôt heurter le mur que de la ramener à un sentiment avenant. Je referme la porte, quant à elle, elle s’engouffre dans la cuisine d’où parvenaient le ronronnement d’une marmite et le sifflement de la cocotte-minute que honnit l’homme par anti goût et qu’adore la femme par gain de temps. L’air était difficilement respirable avec un accès évident de haute tension électrique. Alors gare ! Sous le calme apparent d’une femme, une tempête  couve toujours  heureusement mes trois enfants vinrent à ma rencontre, très bruyants et joyeux. Des bises, des accolades, des câlins. Enfin toutes ces attentions qui prouvent l’amour réciproque, sans lesquelles l’incompréhension prendrait de solides racines, puis le doute s’installerait et viennent à l’esprit les pires questionnements.     

         Elle boude, je boude. C’est de bonne guerre, je suppose. C’est une façon pour elle de s’exprimer, surtout pour se mettre en valeur, évaluer mes attentions à son égard. Néanmoins, elle n’a souhaité aucun vœu à exaucer, ni désir à satisfaire. C’est une question, je crois, existentielle pour elle. Je n’y accorde aucun crédit, car elle finira par rompre son mutisme d’elle-même, dans un laps de temps très court, consciente que tout prolongement risque de faire dégénérer les choses négativement. Donc, je ne l’interpelle pas, ni la provoque. C’est ce qu’il y a de mieux à faire pour la bonne entente de notre couple. A chacun son fantasme, son champ de liberté aussi.

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